dimanche 14 mai 2017

" Faut r'connaître...c'est du brutal ! "

  L'âge archaïque 1961  Stedjelik Amsterdam          photo Solvej

L'art est une fête !  Karel Appel        Musée d'Art Moderne



Voilà un titre d'expo qui me plaît énormément, en ces temps de morosité artistique...et il n'y a pas que le titre qui me plaît. Voici donc un hommage au fougueux Cobra hollandais, bienvenu, quoique la plupart des oeuvres exposées viennent...du Musée d'Art Moderne ! ( ils ne sont pas allés chercher bien loin, passons *) Mais il est vrai que les voir toutes réunies donne une bonne idée du talent de Karel Appel. Disons le tout net, c'est vraiment l'opposé du délicat Twombly, mais c'est tout aussi beau. Et puis le clou de l'exposition, si on peut dire, c'est une petite vidéo où Appel a accepté d'être filmé en train de réaliser justement l' Age archaïque   ci-dessus, et alors là...c'est absolument extraordinaire de le voir travailler : une concentration, un oeil, un geste ...ah oui, comme disait Michel Audiard : " faut r'connaître...c'est du brutal ! " Mais quelle maîtrise, quel total engagement ! La salle où ces oeuvres sont présentées est appelée " Véhémence expressive " . Bien trouvé.


  Carnaval tragique 1954  Collection particulière          photo Solvej



  Crabe hurlant 1954  MAM Paris          photo Solvej



                     Il y a là-dedans une force, une maîtrise parfaite de la composition et du trait ( au tube ! ) ( voir le film ) qui ne peut qu'emporter une adhésion enthousiaste, en tous cas la mienne. Voilà un peintre qui fait corps avec la matière, pour un résultant époustouflant. Il faut bien sûr voir ces ( grands) formats de loin, mais il n'est pas inintéressant de se rapprocher un peu...



  Fille (détail) 1957  Emden Kunsthall
 
photo Solvej

  Fille 1957 Emden Kunsthall      photo Solvej





















  Nu blessé (détail) 1959  MAM Paris    photo Solvej


Chaque détail pourrait être une oeuvre à part entière.


Ce que j'aime beaucoup, c'est que j'ai l'impression que Appel commençait un tableau dans un état de réception sensible (" abstraction " ) et à la fin, découvrait la forme et par suite, le titre, d'une façon totalement intuitive, mais j' extrapole...




  Nu blessé 1959  MAM Paris            photo Solvej
En tous cas le résultat est magnifique.



Avant ses furies cobraesques, j'aime beaucoup ces deux petits :

  Oiseaux de nuit 1949 MAM Paris           photo Solvej

  Petit hip hip hourra 1949 MAM Paris        photo Solvej


L'exposition présente également un ensemble de "statues" rigolotes intitulé " le cirque "( 1978 ), et pas mal d'autres bricolages que je trouve moins forts. 

Après sa période Cobra, l'artiste continue dans le monumental, mais c'est nettement moins gai : certes il y a toujours la même maîtrise du geste, mais le discours est très pessimiste et la forme, qui s'épure ( fatigue ? on peut le comprendre ) perd son pouvoir expressif si hypnotique.

Dans sa terrible et immense toile " les décapités " ( 1982 ) il y a tout de même un corbeau rigolo 


 Les décapités ( détail) 1982     MAM Paris    photo Solvej


mais la fête se termine, et c'est un peu triste, le maître n'a plus vraiment grand chose à dire, un dernier mot...avant le grand voyage :


  Sans titre ( Feestje ?) 2006      Collection  particulière  photo Solvej


avec un point d'interrogation, en effet ! Mais tout n'est-il pas dans ce point d'interrogation....bien menaçant, la faux de madame la Mort, peut-être ? Sûrement.

* Depuis j'ai appris que ces tableaux ont fait l'objet récemment d'une donation au Musée d'Art Moderne, voilà pourquoi...