dimanche 20 mars 2022

Nicolas, Hyacinthe et mon petit Marcel

Musée Carnavalet 

Exposition Marcel Proust, Un roman parisien 

 

Jacques-Emile Blanche, Portrait de Marcel Proust 1892

 


 

Le musée Carnavalet ( rénové récemment ) est un endroit formidable pour emmener les jeunes pousses...Il regorge de choses passionnantes, et une visite aux vacances de la Toussaint ne suffit décidément pas  à étancher les ardeurs juvéniles !   ( mais à mettre définitivement sur les rotules la grand-mère qui accompagne ! ) L'histoire de Paris est évidemment un sujet inépuisable...Je passe sur les époques paléolithique, romaine, moyen-âge etc...Le 18è siècle présente à ma lycéenne avertie des tas de figures connues : Molière, La Fontaine, Louis XIV, à propos, je m'interroge une fois de plus sur le relatif anonymat dont jouissent deux peintres majeurs à mes yeux, Nicolas de Largillière et Hyacinthe Rigaud. Ces deux portraits sont admirables :


Largillière, Portrait d'un échevin parisien( fragment) 1702 photo Solvej  

Rigaud, Portrait d'homme ca 1700 photo Solvej

Je découvre aussi des  consoeurs dont j'ignorais jusque là le talent :
 
 
 
Marie-Geneviève Bouliard, Portrait d' Adélaïde Binart 1796 photo Solvej

 Bouliard, Binart, ça va être dur de mémoriser ( en plus de Vigée-Lebrun et Labille Guiard ! )

 
Je parlerai plus bas du 19è siècle, et de la chambre de mon idole Marcel Proust.

Vers la sortie, je m'arrête devant une autre oeuvre féminine, l'excellent portrait de Natalie Barney, et son harmonie de gris si subtile : 
 

Romaine Brooks, Portrait de Natalie Clifford Barney, dite "L'amazone" photo Solvej

 
Une après-midi d'automne très riche ! 
                                                             
                       
                         Ce printemps, retour à Carnavalet, non sans mal le dimanche, merci à la Mairie de Paris pour le parcours du combattant/Marais, (même en scooter c'est inaccessible), accompagnée de mon proustien de mari. Voilà une superbe exposition, malheureusement il y a énormément de choses à lire ( et des rassemblements devant chaque cartel ). Pour les amoureux de la Recherche, dont nous sommes ( j'en suis à ma quatrième lecture ) c'est un pur bonheur. Ce ne sont qu'objets ravissants, manuscrits illisibles, photos de famille et de Paris à l'époque, bref, un must. Il y a aussi, bien sûr la chambre de Marcel   ( déjà vue en Novembre ) et d' inconfortables petites cellules très prisées où l'on peut écouter les textes lus par les voix divines de Lambert Wilson ou André Dussolier...Mais le plus beau, le plus émouvant, c'est ce petit film de Céleste Albaret, sa gouvernante, qui raconte comment un soir, fou de joie, Marcel lui annonça cette grande nouvelle : " J'ai mis le mot "Fin", Céleste ! ".

Moi aussi j'ai mis le mot "Fin", mon petit Marcel, à ma série "25 vues du Mont Ventoux " ! ( prochain article).

 
De toutes les nombreuses, plus ou moins remarquables, peintures que présente l'exposition, en plus évidemment du merveilleux portrait de J.E.Blanche bien fréquenté à Orsay, je choisis celles-ci :
 
 
                          Toujours J.E.Blanche, cette tache bleue ! Gonflé, avec ce rouge et ce vert :
 
J.E. Blanche, Le parterre de myosotis 1890          photo Solvej

 
Un clin d'oeil à Whistler, celui-là n'est pas mal non plus :

 
Antonio de La Gandara, Portrait de Robert de Montesquiou 1892 photo Solvej
 
                 
                       Cette ravissante gravure :


Pierre Gatier, Avenue du Bois 1907   photo Solvej
 
 
 
Et of course, un sublime pastel ( comme quoi, pour les génies, la beauté se trouve partout :
 

Vuillard, Le métro " Station Villiers" 1907 photo Solvej


 
Retourner aux piétonnières foules dominicales du Marais, ( et marcher jusqu'au scooter loin, loin ) où je n'ai croisé ni Oriane ni Palamède, ni même Jupien, mais sans doute de nombreux Verdurin, fut difficile...



jeudi 17 mars 2022

Les sept péchés capitaux

... de l'artiste contemporain

 

 

Jérôme Bosch, Les sept péchés capitaux c. 1500  Prado(dans le sens des aiguilles d'une montre, à partir du centre bas : la colère, l'envie, l'avarice, la gourmandise, la paresse, la luxure et l'orgueil )

 

L'envie

 

          L'artiste contemporain enrage de voir toutes les idées que les autres lui ont piquées...Bricolages astucieux, installations grandioses, utilisation de matériel le plus trivial possible, il fait feu de tout bois, ou de tout plastique, mais il n'arrivera jamais à la hauteur de Marcel Duchamp et de son urinoir ( surtout si c'est une fille ).

 Revoyons un peu nos classiques :
 
Géricault, La monomane de l'envie 1822

 

La paresse

 

 Magmas, coulures, monochromes, copies ( pardon, "interprétations" ) le pire c'est qu'il sort peut-être des Beaux-Arts ( quoique...j'en doute ), il n'a pas appris à dessiner, ou alors on l'a convaincu que cela ne servait à rien. Mais il n'arrivera jamais à la hauteur de..., non, je n'ai trouvé AUCUN peintre célèbre qui ne sache pas dessiner. 

Revenons à l'essentiel :

Greuze, Le petit paresseux 1755 Musée Fabre

 

La luxure

 

L'imagination de l'artiste contemporain est sans limites, et le nombre de ses positions bien supérieur à 32. Sade est un petit joueur à côté de lui ! Toutes les provocations, tous les orifices, tous les assemblages sont possibles. Chattes et bites, mais il ne sera jamais à la hauteur de Fragonard, son escarpolette, son verrou et ses petits chiens.
 

Régalons-nous deux minutes :

Courbet, La Bacchante 1847 Fond. Rau Cologne

 

La colère


Destruction de matériel en tous genres, découpages, lacérations, et surtout, hélàs, bien pensance ( légitime, parfois...toutes ces floraisons jaune et bleu...). Mais l'artiste contemporain n'égalera jamais ni la colère froide de Guernica, ni les sanglants innocents massacrés de Rubens, ni Courbet qui déboulonna la Colonne Vendôme un jour qu'il était un peu énervé.
 

Sortons donc de nos gonds ( oui, il y du bleu et du jaune, mais aussi du rouge ) :

Bengt Lindstrõm, Colère 1994


 

La gourmandise

 

Le peintre contemporain ne peint QUE sur des GRANDS formats, utilise des litres de peinture, des kilos de pigments hors de prix et de ce fait enrichit grandement les Marin, Rougier et Plé et autres Géant des Beaux-Arts. Il a les moyens. Il en a sous le pied. Son appétit est incommensurable. Mais il n'arrivera jamais à la hauteur de Michel-Ange ( surtout quand il peignait le plafond de la Chapelle Sixtine ).

 
Après ça, prenons un repos bien mérité :

Brueghel L'Ancien, Le pays de Cocagne 1567 Alte P. Munich


L'orgueil


Etre artiste, de nos jours, c'est surtout se proclamer artiste. L'artiste se doit d'avoir un style dans son oeuvre, certes ( ce qui ne veut pas dire faire tout le temps la même chose ) mais surtout de mettre en scène ce personnage hors du vulgaire, extravagant, unique : L'ARTISTE. D'où toutes ces photos (de mode, surtout les femmes, qui posent fièrement devant leur oeuvre en sac Chanel assorti) (ou en pantalon Gucci maculé de peinture ) instagramesques. (  les hommes sont en général plus sobres, surtout les jeunes, se contentent d'être le plus crade possible...il n'y a que les vieux qui osent les lunettes roses. Ce sont parfois des génies...alors on leur pardonne, suivez mon regard, dear David.) Mais ils ne seront jamais à la hauteur de Picasso, qui disait : " Je ne cherche pas, je trouve ".
 
Admirons un de ces "prétennntieux " :

 


Raoul Dufy, Portrait de l'artiste 1898 C.Pompidou

 

L'avarice

 

Facilité de la " série" ( hé hé, j'en sais quelque chose ), mesquinerie d'idées, peur de s'aventurer hors de sa zone de confort...L'artiste contemporain tient tellement serrés les cordons de son art qu'il est aisé de le reconnaître. L'avantage, c'est que les amis chics peuvent s'extasier facilement au prochain dîner, car ils ont vu le même chez François Arnaud, ou Bernard Pinault, ou peut-être l'inverse. Mais il n'égalera jamais Cézanne qui n'a acheté que deux pommes et une seule montagne dans toute sa vie.
 
 
Ne soyons pas mesquins :

Mathias Stomer, L'avarice 17è s Musée de Grenoble


 
                                            Ceci dit, je m'aperçois, en me relisant, que je relève d'à peu près toutes les catégories, ha ha !! Donc, je suis un artiste contemporain. CQFD