dimanche 23 décembre 2012

Bobo mais beau



En été, Auguste Renoir (det)
La rêverie tzigane, Gustave Courbet (det)



Exposition " Bohèmes " au Grand-Palais



                                            Voilà une superbe exposition, " scénographiée " par Robert Carsen, éminent metteur en scène lyrique que nous autres habitués de l'Opéra de Paris connaissons bien..(c'est loin d'être le pire, d'ailleurs).

                          Donc, maintenant, la peinture sur les murs ne suffit plus, il faut aussi un décor "adapté  sur mesure " ( corollaire : les expos vont coûter de plus en plus cher et il faudra de plus en plus d'entrées pour que ce soit rentable, damned ).

       J'ai toujours pensé que le cadre était très important, et qu' un Solvej bien habillé ferait plus d'effet qu'un Rembrandt dans un sous-verre   (peut-être pas, tout de même !!!)   mais là, je me demande si on ne va pas un peu trop loin : il y a du papier peint (artistiquement ) déchiré derrière les portraits de Liszt, Delacroix, Courbet,  une salle de chevalets ( qui ont bien servi ) pour présenter des petites scènes d'atelier,   moyennant quoi on ne voit rien parce que les pieds (des chevalets ) (et ceux des gens qui s'agglutinent autour ) gênent,  une espèce de roulotte (?) ailleurs  et bien sûr,  Pavarotti qui nous hurle "Mimiiiiiii !!"  (bon, je préfère Di Stefano, chacun ses goûts)  dans les oreilles,    enfin dans la salle   "Montmartre ", il y des chaises "bistrot "( on peut s'asseoir mais attention, elles sont collées ! pardon, scénographiées ) et des suspensions adéquates, on s'y croirait,     et quand on aura fini de s'extasier sur le décor,  est-ce qu'on pourra jeter un coup d'oeil à "l'absinthe",
 ce chef-d'oeuvre absolu et glaçant de Mr Degas ?


 Dans un café ou l'absinthe   Edgar Degas 1875/76

            En face il y a un beau tableau d'un certain Ramon Casas, quasiment sur le même thème.



Madeleine ou Au Moulin de la Galette  Ramon Casas  1892


             La confrontation des deux oeuvres me donne envie de dire vulgairement : " y a pas photo ! "...
( même si cette Madeleine est décidemment bien jolie ) mais justement,   il y a dans ce tableau une sorte de vulgarité, en dépit du fait qu'il soit très bien composé et très bien peint, qui l'éloigne de Degas autant que Céline Dion de Maria Callas...Lorsqu'on regarde" l'absinthe ", l'essentiel est immédiatement perceptible, le sujet du tableau,traité  avec une sobriété incroyable, simple tache vert/jaune, (comparez avec le verre d'à côté et la carafe, réalistes ) . Le sujet c'est l'alcool et la tragédie de l'alcoolisme, et c'est justement cette incroyable économie de moyens qui l'exprime le mieux, aucun détail inutile.


La composition avec ses diagonales pas vraiment parallèles,  cette asymétrie à la fois dans la géométrie et dans le "remplissage" ( il y a les grands vides blancs des tables au premier plan et deux portraits dans un petit espace en haut à droite ) dirige notre oeil tout droit sur la tache jaune ( ce n'est pas "un petit pan de mur"...mais c'est tout comme).





 
Il n'a pas peint les mains, mais il a peint les pieds et leur 

position "en dehors" ,  avachie, exprime peut-être tout l'abandon de la créature , sa faiblesse devant la consolation facile qui lui est offerte mieux encore que son expression... ( à moins que ce ne soit juste qu'elle ait trop marché...!)


Bien sûr ce regard vague, ( ce doit être au moins sa deuxième !) ajoute à la grandeur et contrairement à Madeleine qui attend un homme ..qui ne vient pas ( c'est le contraire de Jacques Brel ! )  ( et puis Madeleine a allumé un cigare, pour faire genre, et n'a pas encore attaqué son verre, elle )   il n' y a aucun sentimentalisme, aucune mièvrerie dans son expression, juste  lassitude,  désespérance,  lucidité?


      



A côté de l'héroine, on voit que le pote Marcellin Desboutins, qui ne devait pas non plus sucer que de la glace, (et puis, c'est bien connu, les peintres, ça boit ) tient mieux la distance, lui.




  



              

 Enfin, pour parachever le chef-d'oeuvre, Degas a signé en biais, sur le journal. Certains petits détails...ne sont pas inutiles. Il faut se méfier d'un peintre qui n'aurait pas une belle signature...





 Avec tout ça, je n'ai pas parlé de Courbet, mon chéri dont plusieurs tableaux merveilleux sont exposés (je vous laisse admirer la mèche de cheveux de la "Rêverie tzigane" en haut de la page, avec 
" En été" de Renoir, aussi belles l'une que l'autre)
                    et comme c'est Noël demain, offrez-vous un gland, une feuille, une branche si vous êtes très riche !!, du "Chêne de Flagey", un de ses plus beaux chefs-d'oeuvre, qui dort bêtement dans un coffre de banque japonais, au risque d'être englouti par le prochain tsunami, et qui serait tellement mieux chez lui, à Ornans ! :

                                              http://www.musee-courbet.fr/

                             Bonne fin d'année à tous et à bientôt sur la peinture Hollandaise !

jeudi 20 décembre 2012

Eve

portrait d'Eve 15-H  10P   4/4/1967


Eve au chignon 69bis-11/1973  

Eve aux étoiles-11/1973-



Eve à la tasse de thé 78-11/1974








Eve aux lunettes  1997









Eve au collier   1998

mercredi 5 décembre 2012

Moins + moins = encore moins !

Le Palais de Tokyo ( ou plutôt seulement son "restaurant")



Dans une vie antérieure j'ai été " décoratrice ", ( je préférais " architecte d'intérieur", beaucoup plus chic ...!) et c'est pourquoi je ne peux passer sous silence cette petite halte au nouveau Centre d'Art Contemporain  "Palais de Tokyo ". Evidemment nous sortions de la maison de Balzac, un endroit tout à fait ravissant (et peuplé de fantômes grandioses) et d'une exposition "Carnaval à Paris", présentant majoritairement des gravures de Gavarni, un merveilleux dessinareur, donc le contraste fut très, très rude.
Gavarni
                                       Il est des lieux très " abimés "  qui gagnent à rester "dans leur jus"( les anglais appellent ce style "shabby chic") , je pense entre autres au théâtre des Bouffes du Nord, au merveilleux restaurant de la Manufacture à Avignon, même, pardon d'être "perso", aux murs mangés de salpêtre de certain mas comtadin qui m'est cher...mais dans ces endroits magiques, il y a des éléments destroy et d'autres très raffinés, ce qui crée le charme...
                                                       Or, que voit on dans ce haut lieu de la branchitude intello-arty ?? Des murs pourris, OK, des fils (électriques) apparents, (entre nous d'ailleurs je me demande, vu le contexte "sécuritaire", si vraiment, ils sont branchés quelque part)  (j'imagine le délicieux bambin arrachant ludiquement les dits-fils et les suçant benoîtement )  (oui, j'ai mauvais esprit)  OK, des meubles vintages (c'est à dire usés) mais Knoll à moins que ce ne soit l'inverse, OK, des carreaux cassés, ah ?, OK, des bandes noires et jaunes "chantier" dont il subsiste à peine le quart, OK,  un espace librairie "en cage" derrière des grillages (attention, une pensée intelligente risquerait de s'enfuir !) etc, etc...et une promenade aux "toilettes" , escalier brinquebalant de chantier (encore), porte pivotante qui provoque la perplexité générale, à gauche ? à droite ? gasp ?? en plastique qui fut translucide dans une autre vie, tags, (normal) (so chic) abreuvoir à animaux(normal)(so chic) pour se laver les mains avec pomme de douche (si,si) et flacon plastique de détergent industriel ....bref, bref, ( et j'oubliais les serveurs assortis, répugnants, "ils doivent faire un casting", dit Jules) tout cela est pitoyable, honteux, en un mot, bête...à pleurer.
       Je n'ai pas vu le Musée. Pas eu le courage.